Fausse couche, pas faux deuil
(29 janvier 2019)

Une amie à moi, m’a demandé de trouver un texte parlant du deuil lié à une fausse couche pour mettre sur son blogue, étant donné que j’ai vécu une fausse couche et une interruption de grossesse involontaire.

J’ai cherché et cherché, sans trouver un texte qui représentait réellement ce que j’ai ressenti. J’ai donc décidé d’écrire moi-même le texte.

D’abord, le deuil est quelque chose de relatif à chaque personne, ce n’est pas nécessairement rattaché à un décès. Il peut également être lié à un évènement ou même à un objet. Si une personne a de la peine ou dit être en deuil, nous n’avons pas le droit de la juger et de lui dire que ce qu’elle vit n’en est pas un, parce que c’est un sentiment différent pour chacun.

Une fausse couche ou une interruption de grossesse, peu importe le nombre de semaines, c’est un deuil qui est très difficile à surpasser. La première raison est que notre société banalise la fausse couche. La majorité des gens disent que ce n’est pas un deuil, qu’il n’y a pas de raison d’être triste puisque la femme n’a pas connu le bébé et que de toute façon c’était juste un fœtus. Cependant, je vais vous dire une chose, même si nous ne le sentions pas encore bouger, même si nous n’avions pas encore entendu le cœur pour certaines, ce petit être là, on le voulait. De plus, on a quand même ressenti quelques symptômes : les maux de cœur, la fatigue intense, les manques d’appétit, etc. Même s’il était encore au stade de fœtus, on avait hâte de le sentir bouger, de voir l’échographie, de savoir le sexe, d’enfin voir sa petite binette après tous ces mois d’attente, de pouvoir le tenir dans nos bras, de le voir grandir…

Et dites-vous bien qu’une fausse couche ou l’interruption de grossesse peuvent aussi bien être dans les premières semaines mais parfois, cela se produit après plusieurs semaines et parfois nous avons même déjà entendu le cœur du bébé et nous l’avons vu grâce à l’échographie, ce qui rend les choses encore plus concrètes pour les deux parents. Est-ce que vous oseriez encore dire qu’une fausse couche n’est pas un deuil?

La fausse couche est une perte, une perte de quelque chose qu’on attendait avec impatience. Même si on est conscients qu’il peut arriver beaucoup de choses, dès qu’un test de grossesse est fait et qu’il ressort positif, on commence à imaginer le futur et on a déjà beaucoup d’attentes. Il est donc tout à fait normal de ressentir de la peine, de la colère ou toutes autres émotions intenses. Il ne faut pas s’empêcher de les vivre et si on a envie d’en parler, il faut le faire. Peu importe ce que les autres pensent.

C’est évident que pour l’entourage d’une femme ayant fait une fausse couche ou a subit une interruption de grossesse, ce n’est pas facile à vivre, parce qu’ils ne savent pas quoi dire et c’est tout à fait normal. Mais je vous le dis, si une femme vous dit qu’elle a perdu son bébé et que vous ne savez pas quoi dire, ne dites pas un cliché qui va la blesser, dites-lui simplement que vous ne savez pas quoi lui dire, mais que vous êtes là pour elle. Cette simple petite phrase fait beaucoup plus de bien qu’un cliché comme : «Tu es jeune, tu pourras en avoir un autre!», parce que NON, ce n’est pas un autre que je veux, c’est celui-là que je voulais. Aucun autre bébé ne pourra jamais remplacer celui-là et même si j’ai d’autres enfants, je n’oublierai jamais ceux que j’ai perdus. Un bébé ne peut pas en remplacer un autre.
Il ne faut pas oublier qu’un bébé est fait à deux. Oui, cela affecte beaucoup la mère, mais le père a aussi le droit d’avoir mal et d’être en deuil, même s’il ne le ressent pas nécessairement de la même façon, c’est une épreuve que le couple doit vivre et surmonter ensemble.
Avec le temps, nous finissons par faire notre deuil, chacune en son temps. Et chaque personne vie son deuil de façon différente. Je peux vous dire, que même si nous finissons par cheminer dans notre deuil, nous ne pourrons jamais l’oublier, parce que ce petit être là a fait partie de nous pendant quelques semaines. Comme tous les deuils, nous n’oublions pas, mais nous finissons par intégrer notre perte et on apprend à vivre avec.
J’aimerais tellement que dans notre société, une femme ayant vécue une fausse couche ou une interruption de grossesse puisse en parler aisément sans avoir l’impression de se faire juger. Je sais que je ne peux pas changer les choses toute seule, mais si toutes les femmes qui ont vécues une situation de ce genre, se permettent d’en parler lorsqu’elles en ont besoin, peut-être que cela fera en sorte que le deuil périnatal fera moins peur à notre société. C’est avec les petites actions, qu’on réussit à faire des changements importants.

Je ne peux pas vous obliger à croire que la fausse couche et l’interruption de grossesse sont des deuils, mais j’espère au moins que mon texte vous a fait réfléchir.